Le canal d'Ille-et-Rance

Un chantier pharaonique

1. Les études

Ce furent les différents blocus maritimes, sous le règne de Louis XIV et ce jusqu’à Napoléon par intermittence, qui amenèrent les États de Bretagne à étudier la mise en place d'un réseau de canaux, par une commission qui présenta au roi Louis XVI une carte générale d’un projet. Il faut attendre le tout début du XIXe siècle, pour que le consul Napoléon Bonaparte porte un intérêt à ce projet, convaincu de nouvelles menaces de blocus maritime par l'Angleterre. Il est effectué par arrêté consulaire du 21 pluviôse an XI (11 février 1804). Cet arrêté précise, en outre, que les écluses auront une dimension intérieure standard de 27,05 m sur 4,72 m.

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2. Les travaux

Les travaux commencèrent le 12 juin 1804 sur la commune d’Hédé et s’étendent rapidement au point central de partage, sur les communes de Guipel, Dingé et Bazouges sous Hédé.

Le granit servant à la construction des écluses est extrait des carrières de Louvigné-du-Désert. En 1815, les travaux sont presque achevés, mais la paix revenue et le blocus levé, le canal n'a plus d'intérêt militaire. Les travaux sont arrêtés pendant 6 ans, de 1816 à 1822. Le chantier est terminé le 10 juin 1832. Il aura fallu un peu plus de 28 ans pour que l’ouvrage long de 84,802 km se termine enfin à l’automne 1832.

Il ne faut pas confondre la liaison Manche-Océan qui fait 240 km de St Malo au barrage d’Arzal dans le Morbihan. Le canal d’Ille et Rance va de l’écluse du “Mail” à Rennes. Il se termine à l’écluse du “Châtelier” à Saint-Samson dans les Côtes-d’Armor. Ce tronçon peut paraître modeste aujourd’hui mais ne comporte pas moins de quarante-huit écluses. Les maisons éclusières sont érigées parallèlement à l’avancée des travaux. Les maisons de style napoléonien sont sur deux niveaux alors que celles érigées sous la restauration sont de plain-pied.

3. La main d’œuvre

1400 ouvriers sont employés sur le bief de partage. Ces travailleurs locaux effectuent aussi des travaux ruraux. Les journées de travail sont de 10h l’hiver jusqu’à 16h l’été. Quelques dizaines d'insoumis et de déserteurs des armées sont employés de 1806 à 1810. On sait seulement que 292 hommes du 9e bataillon de prisonniers espagnols participent aux travaux. Ils ne restent que 110 jours sur le chantier. La préfecture donne des instructions en ce qui concerne leur tenue et leur nourriture. Certains prétendent que l’on aurait fait venir des bagnards de Brest étant donné la grande pénibilité des travaux par endroits.

4. Le camp

Le lieu-dit « Le Camp » qui subsiste sur le territoire de Guipel tire son origine de la construction. C’est à cet endroit qu’est érigé, non loin du bâtiment où logent les entrepreneurs, qui abrite les ingénieurs, un édifice qui reçoit aussi : les prisonniers, déserteurs et insoumis de l’armée napoléonienne ainsi que leurs gardiens. La cuisine qui alimente tous ces hommes se trouve aussi dans l’enceinte.

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5. Le bief de Guipel et hydrographie


Deux plans d’eau importants servent depuis l’origine de réserve pour l’alimentation et la régulation du canal. Un plan d’eau situé à Gosné alimente le canal via l’Illet et celui de Feins par la rigole du Boulet. A noter que les réserves d’eau de Feins, d’Hédé, Bazouges, de la Bézardière et de la Plouzière ont été creusées simultanément à la construction de la saignée prévue à usage militaire. A Guipel se trouve la ligne de partage des eaux, c’est-à-dire l’endroit le plus élevé du canal (65,36 mètres). Précisons aussi qu’à cette époque, la municipalité de Guipel entreprend de grands travaux : construction d’une église, d’un presbytère et d’une école publique de garçons.

 

 

 

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6. La vie d’un éclusier

Les éclusiers sont recrutés sur concours. Ils doivent être capable de gérer l’écluse sur le plan administratif et d’assurer l’entretien de l’ouvrage. Ils travaillent 7 jours sur 7 de jour comme de nuit.

 

 

7. Économie

Celui-ci a permis à la région de connaître enfin une certaine prospérité économique. Sur la commune de Guipel, nous pouvons dénombrer pas moins de 9 ouvrages d’art liés au canal (une écluse et sa maison N° 20), 5 aqueducs, les quais de « La Plouzière’ , vannage du bassin de Vilmorin et le pont de « La Ploubière ». Les péniches sont tirées (halage) par des chevaux, des ânes et parfois même par des hommes.

Entre 1860 et 1880, nous dénombrons de 1100 à 1800 passages de bateaux par an et le transport de marchandises s’élève à 150 000 tonnes. Le 26 avril 1857, le train fait sa première apparition en gare de Rennes. La ligne Rennes-Saint-Malo ouvre en 1864 et à partir de 1911, le volume de marchandises transportées sur le canal ne cessera de décliner.

Tout au long du XIXe siècle et durant les trois premières décennies du XXe siècle, le canal va remplir une vocation marchande. Les péniches chargent et déchargent du charbon, des matériaux de construction, de la chaux (notamment à St-Germain-sur-Ille où fonctionnent des fours à chaux), du bois à brûler, des métaux, des produits industriels ainsi que des produits agricoles (grains, pommes, vin, cidre) dans les petits ports situés entre Dinan et Rennes. 

Depuis son ouverture officielle qui a eu lieu le 28 octobre 1832 jusqu’aux années trente, le canal aura permis un très grand développement économique à notre région.

 

Conclusion

Aujourd'hui, les chevaux de halage ont laissé place aux pêcheurs, randonneurs et sportifs. Le canal n'ouvre plus ses écluses qu'aux plaisanciers. 1972 voit le dernier transport de marchandises. La plaisance se développe à cette époque, les amateurs fluviaux découvrent les canaux, le tourisme va alors donner une nouvelle jeunesse au canal. Le canal est concédé en 1979 par l’état aux départements d’Ille-et-Vilaine et des Côtes-du-Nord (Le département a pris le nom de Côtes-d’Armor le 27 février 1990). Profitez d’être à Guipel pour visiter la Maison du Canal d'Ille-et-Rance où vous en découvrirez plus sur l'histoire de ce canal.

 

Pour en savoir plus

Les manuels et brochures de Marcel Donet. « Le bel ouvrage » disponible à la Maison du Canal. Maison du Canal d’Ille et Rance - La Madeleine 35630 Hédé-Bazouges

Téléphone/fax : 02.99.45.48.90 - Mail : Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser.

Site internet : maisonducanal.free.fr

La Maison du Canal accueille aussi des expositions d'artistes de la région. Et n’oubliez pas que la Maison du Canal offre une entrée permanente et gratuite pour une personne de chaque foyer de Guipel.

 

Article extrait du Canalisez-Vous du 3ème trimestre 2009